Homélie de Mgr Lebrun pour les funérailles du père Meybeck (Yvetot, 5 décembre 2024)
« Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme », telles sont les dernières paroles d’évangile (Lc 21, 36) que le Père Gérard Meybeck a entendu proclamer samedi soir par le P. Michel Padée.
Si le Père Gérard Meybeck avait de plus en plus de mal à se tenir debout devant les hommes, le voici appelé maintenant à « se tenir debout devant le Fils de l’homme », Jésus ressuscité. Chacun d’entre nous a probablement vu les facultés humaines de Gérard Meybeck diminuer, en particulier l’audition et la marche. Or, précisément, ce sont là deux facultés par lesquels sa foi dans le Seigneur s’est nourri, par lesquels il a nourri la nôtre. Il écoutait, il entendait, il méditait la Parole de Dieu, et il marchait, étant un pèlerin dans l’âme et dans le corps.
Gérard entendait, méditait, prêchait la Parole de Dieu. Beaucoup parmi vous ont bénéficié de son enseignement. Arrivé à la dernière étape de son ministère à Yvetot, il a voulu reprendre du service dans un groupe bible. On m’a dit qu’il avait lu intégralement la bible 40 fois ! Il va falloir que je me dépêche !
Son écoute de la Parole de Dieu était centrée sur l’Ecriture. Mais elle dépassait l’Écriture, comme en témoigne sa grâce de relier l’Écriture avec la vie, d’écouter Dieu dans son cœur, et d’entendre avec bienveillance les appels que les archevêques successifs lui lançaient. Originaire de Rouen, il a ainsi sillonné le pays de Caux, le littoral et le pays de Bray comme peu de prêtres l’ont fait.
Je soupçonne mes prédécesseurs ou leurs vicaires généraux –n’est-ce pas Mgr Christian Nourrichard- de pas avoir hésité à l’appeler à de nouvelles missions car il trouvait en Gérard Meybeck un homme disponible aux appels.
Son écoute s’appuyait sans doute sur des qualités naturelles reçues dans son éducation, en famille et à Jean-Baptiste de la salle. Un aumônier militaire –je salue les porte-drapeaux qui ont bien voulu être présents- donne en 3 ou 4 lignes son avis sur le séminariste accomplissant son service en Algérie il y a 65 ans. Je cite : « Monsieur de Rouen. Solide. Très dévoué. Réfléchi. Jeune encore, a cependant du jugement. Ecoute et très docile, avec mérite, parce que un tantinet têtu. Mais toujours souriant, agréable, apostolique et régulier dans sa vie de piété et dans sa vie sacramentelle ».
« Un tantinet têtu ? » Au fond, comme Samuel que nous avons entendu. Il ne se décourage pas devant l’inconnu, devant l’appel à la nouveauté. Peut-on répondre à sa vocation avec fidélité sans être un tantinet têtu ? Dans le dialogue entre le prêtre Eli et le jeune Samuel, quel est le plus têtu ? Les deux, me semble-t-il. Dans ce dialogue à qui pouvons-nous identifié Gérard Meybeck ? Au prêtre, plus âgé et expérimenté, ou bien au jeune disponible à ce que le Seigneur veut encore lui révéler ? Aux deux.
Le chrétien, le prêtre, est à la fois disciple et missionnaire. Dans mes rencontres avec Gérard Meybeck, mon aîné, je n’ai jamais senti qu’il n’était plus disciple, prêt à découvrir encore l’amour de Dieu. Pas plus qu’il ne quittait son zèle apostolique de missionnaire qui lui donnait envie d’enseigner, en particulier les plus jeunes, de faire le catéchisme avec passion et créativité.
Plusieurs parmi vous se souviennent de ce que Gérard Meybeck était aussi un marcheur, un marcheur avec la Parole, un pèlerin. Il marchait sur le chemin de saint Jacques, mais aussi dans les camps avec les jeunes ou dans des périples régionaux voir en moyenne montagne.
Notre vie est fondamentalement un pèlerinage, à la suite de Jésus. Le Jubilé qui commence bientôt nous rappellera que nous sommes des pèlerins d’espérance.
Cet après-midi, nous accompagnons le corps de Gérard dans la dernière étape de sa vie sur terre. Il sera inhumé comme Jésus l’a été. Il va être couché avec ses pères, pour employer le beau langage de la bible (1 R 2, 10 ; 11, 43), et selon notre tradition chrétienne. Et nous le croyons, un jour viendra où il se tiendra debout à nouveau devant le Fils de l’homme (cf. Mt 21, 36).
Retrouver cette homélie en cliquant sur le lien suivant : Homélie de Mgr Lebrun pour les funérailles du père Meybeck